Prier avec une œuvre d’art #Jeudi Saint

 

ECOUTEZ ET VOUS VIVREZ

Le Lavement des pieds 

 Sieger Köder (1925-2015), Le lavement des pieds, musée d’Ellwanden, Bade Wurtemberg

 Sieger Köder est un artiste catholique allemand, « un prédicateur puissant et coloré avec des images ». Il traduit la Parole de Dieu en images, images d’espérance, de foi pour la vie quotidienne.

Cette illustration du lavement des pieds incite à la méditation sur le sens du geste de Jésus et de son dialogue avec Pierre. J’écoute leurs paroles.

 

« Jésus se lève de table, dépose son vêtement, et prend un linge qu’il se noue à la ceinture »

Jésus est représenté de dos, agenouillé devant Pierre, tout penché vers son disciple. La ligne qui part de son épaule jusqu’à sa main immobile posée à côté du bassin suggère qu’il s’est arrêté pour se reposer, comme s’il arrivait au terme d’une longue route ou d’une pénible épreuve. 

Cette pratique de laver les pieds des voyageurs était habituelle à l’époque de Jésus, mais c’était le travail des esclaves. Jésus se fait serviteur, il le fait lui-même, il exprime ainsi son immense amour pour Pierre, pour ses disciples, pour moi. C’est un signe du don de soi, au terme de son voyage sur terre. Je rends grâce pour cet amour de Jésus. Quel engagement je prends aujourd’hui pour le suivre, quelle forme vais-je donner à ce don de moi-même pour lui et pour mes frères et sœurs ?

Seigneur, je te regarde, fatigué du chemin et pourtant toujours prêt au service. Je me souviens d’un jour où fatigué de ma journée, de mon travail, je me suis mis au service d’un frère, d’une sœur, d’une famille qui avait besoin de moi, d’un pauvre dans la rue.

Seigneur, merci d’être si proche de ma réalité quotidienne.

 

 « Puis il verse de l’eau dans un bassin. Alors il se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture. »

Dans l’eau du bassin que Jésus utilise pour laver les pieds de Pierre, se reflètent le visage de Jésus et les pieds de Pierre.

Presque jamais Sieger Köder ne peint le visage du Christ. La tête de Jésus est cachée dans les bras de Pierre, mais on voit son reflet dans l’eau. Il a l’air fatigué.  

Cette eau est verdâtre, sale de la saleté des pieds de Pierre. Jésus est immergé dans cette saleté, son amour est présent dans notre vie. Il y a du chagrin dans ses yeux, ils regardent fixement, ils ne lâchent pas, ils demandent avec force que Pierre accepte son amour.

Les pieds de Pierre, au fond du bassin, sont des pieds forts, témoignant d’une vie active, passée à voyager par de rudes chemins. Ils sont calleux, écorchés, pieds d’un homme pauvre, travailleur. Ils étaient couverts de la poussière des rues, ce qui a rendu l’eau verdâtre, sale.

Seigneur, quand t’ai-je vu présent au cœur de ma médiocre vie, quel accueil t’ai-je réservé ? Comment ai-je accepté ton amour ? Comment me suis-je laissé aimer par toi ?

T’ai-je découvert au milieu de mes désordres, du fouillis, de la saleté de ma vie ? Je cite un moment où j’ai reconnu ta présence, un moment où je n’ai pas vu ou voulu la voir.  

Et les pieds de Jésus ? Eux aussi ont marché sur les chemins, ils sont écorchés, marque de la rigueur du chemin parcouru et du chemin qui reste à parcourir. Est-ce que quelqu’un les a lavés quand il est arrivé ? Jésus est le maître et pourtant il se fait serviteur. Il donne l’exemple. Autorité et service sont appelés en Jésus à entrer en harmonie.

Merci Seigneur, de me montrer l’exemple.

J’imagine Jésus s’abaissant devant ses disciples, lui le maître qui les a enseignés, et je comprends que son geste est réalisé pour les temps futurs, les temps de l’Église naissante, pour nous, pour nous enseigner la charité fraternelle. Je rends grâce pour les actions des hommes qui rendent service, je les regarde, je prie l’Esprit Saint de les éclairer pour mener à bien ces services. Comment est-ce que je me joins à eux ?

 

« Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi. »

Pierre, quant à lui, est tout penché sur Jésus, il étreint Jésus. Sa main droite est posée sur l’épaule de Jésus, heureux du réconfort de son ami. Sa tête est tendrement posée sur son épaule. Veut-il écouter le secret que Jésus veut lui dire à travers ce lavement des pieds ? 

L’autre main est levée en signe de protestation. Humainement il ne peut accepter que Jésus lui lave les pieds, s’abaisse ainsi devant lui. Il est étonné, irrité, voire consterné, il ne peut comprendre. Et ses yeux, dirigés vers le bassin, lui révèlent la face de Jésus. Il doit écouter les paroles de Jésus, se laisser faire, pour entrer dans le Royaume, pour vivre de la vie de Dieu.  Se laisser laver signifie la participation à l’être même du Christ, à vivre avec Lui.

 Quelles émotions les paroles de Jésus provoquent-elles en moi ? et les protestations de Pierre ?

Comment est-ce que j’accepte ces bouleversements que Jésus suscite dans mes habitudes de vie, dans mes rapports avec ceux qui me sont proches, différents de moi ?

 Comment ai-je pu voir le visage de Jésus, le reconnaître dans de toutes petites choses, alors que je le prie comme mon Seigneur et mon Dieu ? Je trouve des exemples dans ma vie de ces derniers jours.

 

 « Comprenez-vous ce que je viens de faire pour vous ? »

Ce récit du lavement des pieds est propre à l’Evangile de Jean. Les évangélistes Marc, Matthieu et Luc, eux, racontent le récit de l’institution de l’Eucharistie. Aussi Sieger Köder a représenté une coupe et une assiette contenant du pain. Ils émergent à l’arrière-plan, dans l’angle supérieur gauche. Oui, si l’Eucharistie est bien pour les croyants le signe de la présence du Seigneur, le service des frères l’est aussi. Les deux gestes s’éclairent mutuellement, deux faces d’une même participation au mystère pascal du Christ. Ce ne sont pas deux événements mais deux aspects d’une vie unique. Jésus propose aux disciples d’avoir part à sa vie nouvelle, celle du Père qui se donne dans sa pâque, par le service des frères qui est signe de la présence du Seigneur.

Quel lien est-ce que je fais entre ma vie de prière, ma participation à l’Eucharistie et mes actions de service pour les autres ? Comment est-ce que je fais de mes actions envers mes proches une prière ? Je réalise qu’en faisant du bien autour de moi, je vois Jésus en chacun ? Je me remémore une personne en particulier, ami, malade, en difficulté et je vois en elle Jésus lui-même, chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25, 40 )

 

Avec sainte Thérèse d’Avila prions :

« Le Christ n’a pas d’autre corps sur terre que le vôtre, ni d’autres mains que les vôtres, ni d’autres pieds que les vôtres. C’est par vos yeux que s’exprime la compassion du Christ pour le monde ; par vos pieds qu’il s’en va faire le bien ; par vos mains qu’il va bénir aujourd’hui l’humanité. »

 

 L’injonction de Jésus se mue en béatitude, celui qui vit à la manière de Jésus, qui l’écoute et se laisse envahir par son amour, est voué au bonheur qu’il a promis et possède la vie en plénitude.

 

« Amen, amen, je vous le dis : un serviteur n’est pas plus grand que son maître, ni un envoyé plus grand que celui qui l’envoie.

Sachant cela, heureux êtes-vous, si vous le faites. »

 

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